Audiard, Corsini, Trier

Les Olympiades, film de Jacques Audiard

La Fracture, film de Catherine Corsini

Julie en 12 chapitres, film de Joachim Trier

Trois formidables films ont retenu mon attention ces dernières semaines. Trois films très différents, tant sur le fond que sur la forme, qui délivrent chacun à leur manière un message original. Ils décrivent notre époque de façon intelligente, cette époque marquée par un certain désenchantement, une forme subtile de mélancolie.

« Les Olympiades« est un objet cinématographique d’une grande élégance. Dans ce nouveau film, Jacques Audiard propose un très beau noir et blanc qui sublime les trois personnages principaux interprétés par de jeunes acteurs de grand talent. Julie Zhang, Noémie Merland et Makita Samba crèvent l’écran. Nous sommes à Paris dans le 13ème arrondissement, quartier des Olympiades à l’architecture si particulière. Rencontre, amour, désamour, changement de vie… Les personnages se cherchent, se trompent, apprennent de leurs erreurs… Ils apprennent surtout à aimer malgré la dureté d’une époque qui donne de plus en plus de place aux rencontres sur Internet. Le film est plein de charme et aborde de façon subtile un tas de sujets très intéressants (le harcèlement, l’affirmation de soi, la place des enseignants dans la société…).

« La Fracture » nous parle aussi de façon très forte de la France d’aujourd’hui. L’hôpital est le personnage principal et il ne se porte pas bien. S’y rencontrent les différentes couches de la société. Le personnel soignant, débordé par la charge de travail, tente de faire au mieux pour s’occuper de tous les patients alors même que les blessés affluent du fait des violences policières qui émaillent une manifestation de Gilets Jaunes. Le ton choisi par Catherine Corsini est résolument celui du pamphlet voire de la farce. Bourgeois et prolos se retrouvent face à face et cela fait des étincelles. C’est très drôle et en même temps tragique. Valeria Bruni Tedeschi, en pleine crise de couple car quittée par sa compagne interprétée par Marina Foïs, est irrésistible dans ses exagérations et dans le mépris de classe qu’elle exprime sans vergogne. Elle se retrouve coincée sur un brancard en compagnie d’un Pio Marmaï au bout du rouleau, chauffeur de poids lourd et gilet jaune. L’incompréhension entre ces personnages issus d’univers sociaux opposés est abyssale. La réalisatrice montre, en forçant le trait, à quel point les fractures de la société française sont aujourd’hui loin d’être résolues.

« Julie en 12 chapitres » de Joachim Trier est un film d’une grande originalité et d’une grande sensibilité Le réalisateur norvégien invente le personnage de Julie et nous raconte son entrée dans l’âge adulte et sa vie de jeune femme, en douze chapitres. Qui est Julie ? Difficile à dire car c’est un personnage ambivalent, insatisfait, en recherche permanente d’un idéal, mélancolique. Elle aime et est aimée, mais est-elle comblée ? Parvient-elle à savourer pleinement la joie d’une relation équilibrée ? Les tourments de Julie traversent tout le film malgré le bonheur qu’apportent les deux rencontres amoureuses sincères qui marquent sa vie. Sa psyché est mise en image dans une scène mémorable. Après avoir consommé des champignons hallucinogènes, Julie bascule dans un bad trip. Joachim Trier filme alors les angoisses de la jeune femme (la peur de devenir mère, la peur de vieillir), met en avant son ressentiment à l’égard d’un père distant qui ne lui a pas assez donné d’amour. La magnifique interprétation de Renate Reinsve, justement récompensée à Cannes, est très émouvante. Julie est un personnage qu’on n’oublie pas.

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